J’ai eu l’honneur de rédiger l’introduction du Jahrbuch 2021 « Nachhaltiges Investment Schweiz », qui vient de paraître (seulement en allemand):

« La place financière suisse doit être un leader mondial dans le domaine des services financiers durables ». Telle est l’ambition du Conseil fédéral, telle qu’il l’a présentée au public en juin de cette année, flanqué de représentants* du secteur financier. Et cela permet en fait d’être confiant. En revanche, il est plus que douteux que la stratégie choisie soit la bonne. Il faut des mesures efficaces et la confiance de la Confédération, sinon ce noble objectif risque de rester une simple déclaration de volonté.

Il est vrai que les attentes vis-à-vis du rapport du Conseil fédéral sur la durabilité dans le secteur financier étaient élevées. Le rapport constitue une très bonne base pour les prochaines étapes de l’orientation des flux financiers vers un objectif de réchauffement de 1,5°. Mais le Conseil fédéral ne tire pas les conclusions qui s’imposent. Il ne veut s’attaquer lui-même à aucune des mesures identifiées et renvoie la balle, et donc l’entière responsabilité, à la branche. Celle-ci doit atteindre ce grand objectif par ses propres moyens et sous sa propre impulsion. Cela devrait réjouir la branche dans un premier temps et c’est certainement ce qu’elle voulait. La réglementation entrave l’innovation. L’argument courant est que l’innovation est nécessaire pour atteindre cet objectif de durabilité sur le marché financier.

Mais c’est un peu court. Les banques ont justement perdu beaucoup de confiance avec la crise financière et les scandales à répétition. Et le blanchiment de produits financiers, tel qu’il a parfois été pratiqué sportivement par de nombreux acteurs au cours des dernières années, n’a certainement pas renforcé la base de confiance, encore bien mince, en matière de durabilité.

Il serait pourtant nécessaire que le secteur et la politique s’unissent pour construire la crédibilité avec des règles contraignantes, des définitions claires et surtout de la transparence. Il manque en effet à la branche la crédibilité qui lui permettrait de s’engager elle-même. Pour cela, la Confédération doit peser de tout son poids dans la balance. Car ce n’est que si les clients sont informés de manière globale et contraignante sur l’empreinte écologique des produits financiers et si les offres nuisibles à l’environnement sont tarifées en internalisant les coûts des dommages à long terme qu’il sera possible de se positionner comme place financière leader au niveau mondial.

La mesure la plus urgente serait sans doute maintenant que la Confédération participe activement à la définition de la durabilité. Car même si l’UE va de l’avant et a posé des jalons importants avec sa taxonomie, le travail de mesure de la durabilité est un processus itératif à long terme. Et des tâches difficiles restent à accomplir, comme par exemple l’analyse des effets du marché financier sur la perte de biodiversité.

Et pour cela, le personnel du marché financier doit être formé, une autre mesure urgente.

Et c’est précisément grâce à cette réflexion approfondie sur le sujet – dans le secteur et au sein de la Confédération – que l’on obtient non seulement de la crédibilité, mais aussi un avantage concurrentiel. Un avantage concurrentiel global, comme le souhaitent la place financière et le Conseil fédéral.

Tout le « Jahrbuch » (PDF)