Le secteur financier suisse est coresponsable de 14 à 18 fois des émissions totales de CO2 dans le monde, ce qui en fait de loin le plus grand levier climatique de la Suisse. Des règles climatiques contraignantes pour le secteur ? Toujours aucune !

Le financement de projets et d’entreprises à l’étranger, qui se consacrent principalement à l’exploration, au raffinage et à la combustion du pétrole, du gaz et du charbon, est à l’origine de la coresponsabilité des institutions financières dans le réchauffement climatique. Certes, le secteur a très vite découvert le potentiel marketing de la megatrend de protection du climat et a annoncé il y a quatre ans, flanqué du conseiller fédéral de l’époque, Ueli Maurer, qu’il voulait devenir le champion du monde des services financiers durables. Le secteur ne se lasse pas de répéter l’importance de sa contribution à l’objectif « net zéro ». On pourrait penser qu’il s’agit là d’une opportunité unique pour la place financière suisse de mener une politique climatique efficace. Mais les promesses sont-elles tenues ? Ces dernières années, de nombreux établissements financiers ont surtout brillé en peignant en vert ce qui était en brun. Les efforts sérieux des institutions financières progressistes pour développer des produits financiers ayant un impact positif sur le climat ont été discrédités par les gros titres de l’écoblanchiment de ceux qui sont moins sérieux- ce qui était malheureusement prévisible.

Depuis que je suis au Conseil national, je m’intéresse de près au verdissement de la place financière. Et je suis désillusionné. Des discussions intenses et une collaboration à première vue constructive ont à chaque fois débouché sur des « malheureusement, non » lorsqu’il s’est agi de passer à la concrétisation. L’exemple le plus récent est l’intervention des Verts que nous avons traitée lors de la session de printemps et qui proposait un accord contraignant avec la branche : elle devait définir elle-même la voie vers le zéro net, le Conseil fédéral contrôlerait la réalisation des objectifs et n’interviendrait que si elle n’était pas sur la bonne voie. Une régulation libérale typiquement suisse, telle qu’on la connaît dans d’autres secteurs, raison pour laquelle le Conseil fédéral avait recommandé l’adoption de la motion. En première ligne, l’Association suisse des banquiers s’y est opposée, sans surprise. Elle considère que le secteur a seulement l’obligation de faire preuve de transparence sur son impact climatique. Mais cela signifie aussi que le secteur veut proposer des produits financiers nuisibles au climat tant qu’ils sont demandés. La responsabilité est donc tout simplement entièrement déléguée à la clientèle.

Pour moi, la preuve était ainsi faite : les déclarations de l’association faîtière sur sa volonté de devenir « net zéro » ne sont pas à prendre au sérieux. C’est pourquoi le moment est venu de lancer une initiative populaire.

Lors de l’assemblée des délégués du 6 avril à Rennens, les délégués VERT-E-S ont décidé de lancer une initiative bénéficiant d’un large soutien. La barre est placée plus haut que ne le prévoit l’accord de Paris sur le climat.Car il ne s’agit de loin pas seulement du climat, mais aussi de la biodiversité.C’est pourquoi le projet d’initiative prévoit non seulement de fixer un objectif climatique ambitieux pour le marché financier, mais aussi d’y intégrer la protection des espèces.Il est temps de lancer l’initiative pour la place financière !